Arbustes La multiplication en question
Des essais réalisés dans des stations Astredhor entre 2014 et 2019 ont établi un nouveau système de bouturage des arbustes de pépinière hors sol. Laurent Mary, responsable d’expérimentation à la station du Vézendoquet, à Saint-Pol-de-Léon (29), en explique le fonctionnement.
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Traditionnellement, la multiplication en pépinière se déroule en période automnale, avec des boutures aoûtées. Une fois enracinées,celles-ci peuvent être utilisées directement par des pépiniéristes ou repiquées dans des alvéoles plus grosses, des godets ou des préconteneurs avant d’être rempotées dans leur conteneur final. Dans ce schéma, une forte proportion de boutures de tronçon sont repiquées en jours décroissants ou courts, avec des températures peu élevées, un chauffage réduit et selon le modèle « une bouture pour un jeune plant ».Il en résulte une multiplication de longue durée marquée par un enracine- ment lent et la nécessité de tailler les jeunes plants plusieurs fois. Ils subissent également des rempotages successifs dans des contenants de taille croissante, ce qui renchérit les coûts de production.
Un nouveau système
Dans l’objectif de produire des végétaux dans des conteneurs de 4 litres en moins d’un an et des végétaux en conteneurs de 7 litres en un an et demi entre le bouturage et la vente, plusieurs techniques ont été associées dans un itinéraire de multiplication afin de faciliter l’enracinement et la ramification :
- le prélèvement de boutures herbacées ou semi-herbacées en jours croissants ou longs sur des pieds mères forcés sous abri, sur lesquels ne sont prélevées que des boutures de tête pour obtenir des jeunes plants très homogènes qui s’enracinent tous à la même vitesse ;
- le repiquage réalisé en mottes de culture industrielles de type Fertiss ou Jiffy (lire l’encadré Repères) ;
- l’utilisation du schéma « trois boutures pour un jeune plant » afin d’accélérer la croissance et la ramification dès le début de la culture.
Les essais ont été réalisés en deux phases :
l’une de multiplication pour produire les nouveaux jeunes plants avec les techniques décrites précédemment, et la seconde, d’élevage, où les jeunes plants ont été rempotés en conteneurs pour produire en cycle court des végétaux commercialisables.
Gestion des pieds mères et bouturage
Dans nos essais, les prélèvements de boutures herbacées ou semi-herbacées ont été effectués entre février et mai sur des pieds mères qui étaient des plantes en C3L (conteneur de 3 litres) mis temporairement en conditions favorables à la croissance en les rentrant sous abri à la fin de l’automne, à une température d’aération de 12 à 16 °C. La période idéale de prélèvement des boutures est le mois de mars. Mais on peut prélever les boutures plus tard si on veut décaler la période de commercialisation des plantes finies.
Les boutures ont été enracinées en mottes de culture sous fog et avec chauffage au sol (température des mottes : 20-22 °C). La maîtrise de l’hygrométrie est importante pendant l’enracinement car les boutures herbacées sont sensibles à la déshydratation. Lorsque des racines étaient visibles à la surface d’au moins 80 % des mottes, les plaques ont été sorties de l’enceinte et laissées sous abri jusqu’au rempotage.
Résultats de la multiplication
La conduite de multiplication testée a donné un enracinement rapide des boutures, en deux à huit semaines selon les espèces, avec un taux de réussite relativement élevé pour la plupart d’entre elles (77 à 100 % de boutures enracinées rempotables). Certaines espèces comme Photinia, Eleagnus et Pittosporum sont toutefois restées récalcitrantes à cette conduite et ont subi de nombreuses pertes.
Les plantes à feuillage caduc ont eu un enracinement plus rapide que les plantes à feuillage persistant. Pour ces dernières, on s’oriente vers un prélèvement de boutures semi-herbacées plutôt que des boutures herbacées, qui se déshydratent trop facilement. Le stade de prélèvement des boutures demeure un aspect essentiel de la réussite de la multiplication et chaque espèce a des exigences propres.
Ces opérations de multiplication ont permis de rempoter les cultures dans le conteneur définitif de un à trois mois après le bouturage selon les années et les espèces, c’est-à-dire entre début avril et fin mai.
Les pieds mères peuvent produire chacun 50 à plus de 200 boutures, un rendement à étaler selon les besoins.
Élevage en conteneurs et qualité des plantes finies
Lorsque leur enracinement a été suffisant, les jeunes plants ont été rempotés sous abri en conteneurs et conduits selon un itinéraire traditionnel de façon à observer les répercussions sur la croissance et la qualité finale du produit. Le choix du substrat et de la fertilisation ont été optimisés. Du fait de leur juvénilité, une attention particulière a été apportée à la conduite des irrigations, réalisées par aspersion, de manière à ne pas provoquer d’asphyxies racinaires.
Le comportement du matériel végétal rempoté a été très intéressant. La croissance a été rapide dans l’ensemble, avec une forte capacité de ramification. Les plantes ont tout de même été taillées une à deux fois pour être plus compactes. Mais un rempotage sous abri est indispensable car, si ces jeunes plants ont une forte capacité de croissance, ils sont plus fragiles que des sujets plus âgés.
Pour les plantes qui ont été rempotées en C4L en avril et mai au cours de ces essais, il a été possible d’obtenir des plantes commercialisables dès la fin de l’été pour certaines espèces, en général huit à treize mois après le rempotage. Pour les plantes en C7L rempotées à la même période, le niveau de croissance et la qualité douze mois après sont déjà très appréciables et l’objectif de réaliser le cycle en dix-huit mois a été atteint. Les plantes produites ont un port compact, une forte ramification, un aspect jeune et une belle qualité de feuillage.
L’utilisation de mottes de 6 cm de diamètre à trois boutures (en P40) donne une qualité de végétaux équivalente au rempotage de trois mottes de Ø3 cm avec une bouture chacune.
Importance de l’optimisation du calendrier de rempotage et de la fertilisation
La bonne coordination entre le calendrier de bouturage et celui de rempotage est importante. Lorsqu’ils sont rempotés à temps, les jeunes plants suffisamment enracinés bénéficient de conditions favorables à la croissance racinaire et peuvent construire leur architecture avec moins de concurrence qu’en plaques. L’optimisation de la fertilisation des conteneurs est également nécessaire.
Ce système de multiplication génère des cycles de culture nettement plus courts que ceux des itinéraires traditionnels, tout en apportant un niveau de qualité des végétaux correspondant aux exigences du marché. Mais il sera à valider pour un plus grand nombre d’espèces.
La gestion des pieds mères et les stades de prélèvement des boutures seront également à améliorer et à mieux caractériser pour des cortèges d’espèces plus larges. De plus, il s’agira de proposer des calendriers de multiplication et de culture dans le but d’approvisionner des périodes différentes de commercialisation et pour qu’ils soient adaptés à la production de plantes vendues en fleurs.
responsable d’expérimentation
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